23 Mars 2016
La retraite et le non-travail, termes que l’usage a longtemps traduits par loisirs, mais dans lesquels les spécialistes d’aujourd’hui voient plutôt la disponibilité à l’essentiel.
Et certes, les loisirs qu’on pratique dans les parcs du même nom relèvent plus de l’art de se détourner de l’essentiel plutôt que de s’y consacrer.
Pour la « société », le travail est valeur positive, et ceux qui pratiquent un loisir sont ceux qui ne travaillent pas ! Moi j’ bossé comme un mulet, études comprises, pendant plus de 42 ans !
Il devient donc urgent de voir dans le temps de la retraite, autre chose qu’un temps vain vainement occupé, mais au contraire le temps où, libéré de l’affairement, l’homme consacre son industrie à ce qui le vaut vraiment.
Mais on ne change pas un regard par décret…
Pouvoir aimer le temps où on a du temps semble alors le fait des plus privilégiés de nos aînés, de ceux que leur richesse personnelle, affective, morale voire spirituelle prémunit souverainement des affres de l’attente, comme de celles de l’ennui.
Mais trop nombreuses sont les personnes âgées dont le temps est temps de l’attente plutôt que du loisir : attendre le passage du facteur, attendre la visite - ou un coup de fil - des enfants et petits-enfants, ou celle du médecin, attendre le retour de la douleur lancinante, attendre la mort.
Le temps des personnes âgées apparaît alors comme un temps suspendu, qui a bien des égards est en décalage avec le temps bousculé de la modernité.
Or il est certes possible de jouir de ce temps suspendu, quand on en jouit avec quelqu’un. Ce temps suspendu n’est-il pas la condition de ce que Proust appelait le temps retrouvé ?
Mais trop souvent seules, les personnes « en âge » ressentent généralement leur suspension comme une attente, et leur attente comme une souffrance, précisément parce qu’il y a dans l’attente une dimension de passivité, d’ignorance et d’impuissance.
Ce qui caractérise l’attente, c’est ordinairement cette tension vers l’avenir, qui s’accompagne souvent, soit d’une indifférence, soit d’un mépris agacé pour le présent.
L’attente est manière de s’expatrier du présent en le disqualifiant : parce que le propre de l’attente est d’être uniquement attentive à ce qu’elle cherche et jamais à ce qu’elle trouve, parce que le présent est par définition vide de ce qu’on attend, l’attente le considère généralement comme aussi peu que rien.
Aussi celui qui attend se montre-t-il généralement terriblement injuste à l’endroit du présent !
Parce qu’il sait que ce qu’il cherche ne s’y trouve pas, le présent le plus riche lui apparaît comme la pauvreté même, et le temps qui le sépare de l’arrivée de ce qu’il attend n’a pour lui que la morne et agaçante consistance d’un délai.
"Quoi de neuf aujourd’hui grand-père ? – Rien…"
Il nous semble donc que ce qui rend le temps de la vieillesse si souvent douloureux, c’est la solitude dans laquelle il est vécu.
Que donc d’abord notre société s’oblige à ne pas abandonner ses « vieillards » !
Que d’abord elle mette en place des moyens à la hauteur de ce vertigineux allongement de la vie que sa technique a permis et disparaîtraient du même coup nombre des problèmes que pose cette discordance des temps, qui oppose temps des jeunes et temps des vieux.
Mais répétons-le, on ne change ni un regard, ni une mentalité par décret.
Que faire, dès lors, en attendant ? Que faire, pour vivre pleinement l’automne de nos vies ?
Qu’on n’attende pas de la philosophie un remède souverain ! Mais un rappel de ce qu’elle disait de la belle vertu de patience n’est-il pas élégante manière de terminer ce propos sur le temps de la personne âgée ?
Que faire, dès lors, en attendant ? Que faire, pour vivre pleinement l’automne de nos vies ?
Qu’on n’attende pas de la philosophie un remède souverain ! Mais un rappel de ce qu’elle disait de la belle vertu de patience n’est-il pas élégante manière de terminer ce propos sur le temps de la personne âgée ?
Puisqu'il faut cotiser plus longtemps et qu'on ne veut pas prendre notre retraite notre retraite plus tard, il faudrait réformer les années en les faisant passer de douze à quinze mois...